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Avocats : comment concilier ses vies professionnelle et personnelle ?

Avocats : comment concilier ses vies professionnelle et personnelle ?

Auteur : Justine BACHELET avocate au Barreau de Versailles
Publié le : 09/03/2023 09 mars mars 03 2023
Expertise métier

Aujourd’hui, j’ai eu une conversation avec une élève avocate qui s’apprête à prêter serment et débuter sa vie d’avocat. Ensemble, on a parlé du métier, de ses avantages et de ses inconvénients.

La profession d’avocat est passionnante avec un quotidien riche en rencontres, en apprentissages et défis. Mais c’est aussi un métier très exigeant et très impliquant en termes de temps et d’investissement personnel. Aussi, et pour s’épanouir au quotidien, il est indispensable de trouver un équilibre entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle.

Au quotidien

Le quotidien des avocats est bien souvent chargé de multiples tâches : rendez-vous client, démarche au palais, rédaction de courriers, travail de fond, appels téléphoniques. Les journées sont très denses et il est parfois difficile de s’accorder des pauses ou de quitter son cabinet à une heure raisonnable pour retrouver sa vie de famille.

Si ce rythme peut être tenu un temps, le point de rupture et d’épuisement arrive très vite avec toutes ses conséquences : sacrifice de sa vie personnelle ou burn out professionnel. Certains de mes amis de l’école d’avocats ont finalement décidé de quitter la profession car le rythme de travail était trop soutenu et intenable sur la durée.
Aussi et afin d’éviter cela, il est selon moi indispensable de parvenir à structurer son activité et ses journées pour mener un quotidien rythmé avec des horaires de travail acceptables sur le long terme.

L’avantage de la profession libérale est la liberté de l’organisation de ses journées. Cette organisation est indispensable pour parvenir à gérer son activité professionnelle et s’épanouir dans sa vie personnelle. En ce qui me concerne j’ai éprouvé les techniques suivantes :

  • Bloquer les dates d’audiences et organiser des demi-journées pour les rendez-vous et ainsi se laisser le temps de se consacrer au travail de fonds plusieurs heures d’affilée.J’ai constaté que fixer des rendez-vous de manière disparate à tous les moments de la semaine morcelait énormément les journées de sorte qu’il était très difficile d’être vraiment productive ces jours-là. Aussi, j’ai fait le choix de réunir tous mes rendez-vous sur des demi-journées ou des journées entières afin de me laisser tout le reste de la semaine pour réaliser du travail de fond.
  • Réaliser régulièrement une revue d’agenda pour anticiper le travail à réaliser en vue des audiences. On évite alors de se retrouver à devoir conclure un dossier 48 heures avant une audience et risquer un renvoi du dossier.
  • Lorsque l’on exerce à plusieurs au sein d’un même cabinet, il est très intéressant d’organiser régulièrement des «réunions agenda» qui permettent d’acquérir une visibilité sur les audiences et échéances à venir et de mutualiser la présence d’un membre du cabinet à une même audience pour plusieurs dossiers. Le temps consacré à ce genre de réunion n’est pas du tout de perdu, il permet en réalité une meilleure gestion de son temps ce qui profite à l’ensemble du cabinet.
  • S’équiper d’un logiciel de gestion de cabinet qui permet de gagner du temps sur de nombreuses tâches très chronophages (rédaction d'actes et de courriers, facturation, relances clients…)
  • Ne pas hésiter à rédiger des to do lists pour n’oublier aucune des tâches à réaliser et ainsi libérer un peu son esprit. Ce qui est couché sur le papier n’a plus à rester dans la mémoire de l’avocat qui peut alors se consacrer entièrement à ses réflexions juridiques.

Il est possible de mettre en place de nombreuses stratégies qui permettront d’organiser et structurer son activité. Cela peut aussi passer par le recrutement d’un collaborateur ou d’une assistante. Le but est de pouvoir gagner du temps et ainsi être disponible pour se consacrer à sa vie personnelle.
Il est évident que certaines périodes sont plus chargées que d’autres et on ne pourra jamais éviter complètement des journées très longues. L’idée est de parvenir un s’organiser un quotidien confortable sur le long terme.

Week-ends et vacances

Il est très difficile pour un avocat de se couper complètement du suivi de son activité. Quand certains salariés cessent de travailler une fois la porte du bureau fermée, cela n’est pas une réalité pour les professions libérales. C'est d’autant plus vrai à l’ère des nouveaux modes de communications où les e-mails, les appels, les SMS des clients ne cessent pas à 19 heures ou le vendredi soir.

Lorsqu’on débute son activité on souhaite absolument que ses clients soient satisfaits. Et à ce jour, force est de constater que les justiciables sont de plus en plus exigeants avec leur avocat, notamment en termes de disponibilité. Il n’est pas rare que les clients multiplient les SMS ou les appels pour indiquer qu’ils viennent d’envoyer un mail et demander une réponse rapide ! Il est très facile de se faire happer par ces demandes et il est impératif de se préserver de ces exigences afin de conserver une vie personnelle de qualité qui ne sera pas parasitée par sa vie professionnelle.
Pour cela, il faut être très clair avec soi même en ce qui concerne le temps que l’on souhaite consacrer à son activité. Il est bien évident que cette réflexion ne se mène pas de la même façon lorsque l’on est collaborateur ou à son propre compte.

Dans le premier cas, on demeure dans les faits très tenu par les exigences du cabinet. L’amplitude des horaires de travail est forcément très importante si on veut avoir le temps de développer sa clientèle personnelle en plus de la gestion des dossiers du cabinet. Il ne faut pas oublier que ce partage de temps entre clientèle du cabinet et clientèle personnelle peut être évoqué dès l’entretien de recrutement afin que les choses soient très claires tant pour l’avocat associé que le collaborateur. Évacuer la question dès le début permet d’éviter de potentielles frictions plus tard.

Lorsque l’on exerce à son propre compte, il est plus aisé de fixer son propre volume de travail et amplitude horaire. Pour cela, on peut alors mettre en place plusieurs techniques pour faire en sorte que ces horaires soient respectés et que le temps de vie personnelle soit préservé.
En ce qui me concerne, j’ai mis en place l'organisation suivante :

  • Les horaires d’ouverture du cabinet sont indiquées en signature des e-mails
  • J'ai ouvert une seconde ligne téléphonique dédiée à mon activité professionnelle. Lorsque ma journée est terminée, le téléphone est rangé et les réponses aux messages et appels attendront le lendemain.
  • Je consacre mes week-ends à ma vie de famille et je fais en sorte d’organiser mes semaines afin d’être efficace et de ne pas avoir besoin de travailler le samedi et le dimanche, sauf urgence exceptionnelle

Les vacances sont une autre problématique. Il difficile de laisser complétement en suspend ses dossiers pendant une ou plusieurs semaines. Lorsque l’on prête serment, il faut avoir conscience qu’il va désormais être difficile de pouvoir partir trois semaines l’été sans emporter avec soi a minima ses e-mails. Néanmoins, il est possible une fois encore de mettre en place plusieurs choses afin de profiter de ses vacances.
Il est par exemple très intéressant d’exercer de manière groupée avec d’autres confrères, quelle que soit la forme de son cabinet. Lors des périodes de vacances, on peut alors s’organiser afin de se substituer aux audiences par exemple.
Il est là encore important d’anticiper largement afin d’organiser son agenda. Prendre de l’avance sur la gestion de ses dossiers permettra de partir en vacances l’esprit plus léger !

Le cas particulier du congé maternité

Le congé maternité est sans doute le moment le plus délicat dans la vie d’une avocate en ce qui concerne la conciliation de sa vie personnelle et professionnelle. Pendant plusieurs semaines, on doit mettre son activité et ses dossiers entre parenthèses afin de se consacrer à sa maternité. Une nouvelle fois, l’anticipation est le maître mot. Il faut déjà prévenir largement à l’avance ses clients de son état de grossesse et du fait qu’on ne pourra peut-être pas les accompagner personnellement à l’audience. Il faut également là encore faire en sorte de prévoir de se faire substituer pour les audiences fixées pendant le temps du congé maternité (l’intérêt là encore d’exercer de manière groupée).

En ce qui concerne le travail de fond, il est normalement strictement interdit de travailler pendant son congé maternité. Il faut donc parvenir à s’avancer le plus possible sur les actes à réaliser et les procédures à initier afin de pouvoir mettre les dossiers « en pause » pendant quelques semaines. Le temps du congé maternité est précieux et la fatigue est souvent très présente. Gérer des problématiques professionnelles en même temps que les premiers jours de son bébé peut être difficile. Il donc très important d’anticiper au maximum l’organisation de cette période afin de pouvoir vivre sereinement la naissance de son bébé.
D’un point de vue financier, ce congé maternité (ou paternité) peut aussi être source d’inquiétude. L’activité étant en veille, des difficultés financières peuvent être à craindre.

Une fois encore : ANTICIPATION. Il est impératif de se renseigner largement en amont de son accouchement sur ses droits en termes d’indemnités et de primes. Plusieurs prestations sont versées et notamment :

  • Indemnités journalières versées par la CPAM
  • Allocation forfaitaire de repos maternel versée par la CPAM
  • Forfait de naissance versée par un organisme de prévoyance collective (LPA par exemple)
  • Prestations versées par les organismes de prévoyance ou de mutuelle individuelle

Comme indiqué en préambule, la profession d’avocat est passionnante mais très impliquante. Pour s’épanouir tant dans son activité professionnelle que personnelle, des petits efforts sont à faire pour exercer son activité de manière structurée et efficace ce qui permettra de se dégager suffisamment de temps pour profiter de sa famille et de ses proches.

Mon Conseil à un élève avocat sortant de l’école serait également de bien choisir les matières qu’il souhaite exercer. En effet, les dossiers que l’on traite peuvent avoir un impact significatif sur sa vie personnelle. Il peut par exemple être difficile pour certains de rencontrer un client en détention puis de se rendre à un apéritif chez des amis ou de défendre des mineurs victimes et retrouver ses enfants le soir.
Il faut impérativement être à l’aise avec le domaine dans lequel on fait le choix d’exercer son métier et suivre ses aspirations personnelles. Il existe autant de vies d’avocats que de personnalités combinées avec un domaine d’activité. La profession libérale permet une liberté absolue quant à sa façon d’exercer, à chacun de trouver l’organisation et les astuces afin de concilier une brillante carrière professionnelle et une vie personnelle épanouie.
 

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